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Coeur en suspend

  • Claude Gauthier
  • il y a 5 jours
  • 9 min de lecture

Love you can feel, fear holds tight

À la croisée de la photographie introspective et de l’art textuel, cette œuvre explore la tension entre amour ressenti et peur intérieure. Elle utilise le corps comme support d’émotion brute, et le langage comme fracture visuelle. La dualité entre les deux phrases opposées révèle un espace fragile, entre désir d’ouverture et repli instinctif. Une image à la fois intime et universelle, chargée d’une humanité à vif.


Cette oeuvre est présenté à la Galerie Éclats 521 de Montréal à partir du 29 mai 2025.



Love you can feel, fear holds tight
Love you can feel, fear holds tight

Cette mise en scène présente un dialogue émotionnel profond entre deux forces psychiques fondamentales : l’amour ressenti et la peur enracinée. La phrase en rouge « love you can feel », inscrite sur la poitrine, évoque une chaleur intime, une émotion tangible, animale, charnelle et envahissante. L’amour y est présenté non pas comme concept abstrait, mais comme expérience sensorielle, immédiate et réelle. La nudité du modèle, conjuguée à la posture inversée et vulnérable, renforce cette idée d’exposition: offrir son corps, c’est aussi offrir son cœur.


Mais cette promesse d’amour est aussitôt contrebalancée par l'inscription bleue : « fear holds tight ». Positionnée sur la tête, cette phrase semble s’imposer sur une base cérébrale, comme une tension intérieure difficile à desserrer. Elle évoque la peur de perdre, de souffrir, ou d’être rejeté, autant de forces invisibles mais puissantes, qui étouffent la spontanéité de l’élan amoureux. Cette dualité linguistique et chromatique crée un contraste saisissant entre l'amour et la haine, deux sentiments opposés mais également intenses.


La technique de surimpression donne à l'ensemble une dimension onirique et surréaliste. Les textes manuscrits semblent transparaître à travers le corps du modèle, comme si les mots et les émotions du passé habitaient littéralement son être.


L’écriture manuscrite noire en arrière-plan, chaotique et omniprésente, agit comme le brouhaha intérieur des pensées intrusives, des souvenirs et des blessures anciennes. L'arrière-plan révèle un parchemin vieilli aux teintes bleu-vert, couvert d'une écriture manuscrite cursive en noir qui évoque des textes poétiques anciens. Cette calligraphie élégante semble raconter une histoire intime, créant une atmosphère romantique et nostalgique. Le fond aquatique, légèrement trouble, renforce l’impression d’un inconscient agité, d’un mental submergé par des émotions contradictoires.


Ainsi, cette image ne parle pas d’amour pur ni de peur brute, mais de leur cohabitation ambivalente dans l’intimité humaine. Elle expose la tension entre l’ouverture à l’autre et la peur du ravage, entre désir et repli. L’amour est bien là, palpable, mais la peur le retient, l’entrave. L’ensemble donne à voir une lutte intérieure où le corps devient le champ de bataille des émotions.


Description de l'oeuvre


Cette image complexe et symbolique marie le corps humain, l’écriture manuscrite et des phrases contrastées pour créer une tension émotionnelle palpable.


On y voit un modèle nu dans une posture expressive et vulnérable, renversé, les bras en arrière, le regard tourné vers l’observateur. Le corps est partiellement recouvert de superpositions textuelles : des écritures cursives noires s'entrelacent, comme griffonnées sur une page saturée d’émotions. À cela s’ajoutent deux phrases très contrastées, en couleurs distinctes : « Love you can feel » en rouge bordeaux, inscrite au-dessus du torse, et « Fear holds tight » en bleu foncé, positionnée sur la tête.


Le fond est un collage visuel mêlant des éléments marins ou aquatiques, une texture semblable à un texte imprimé et une lumière diffuse bleutée, créant une atmosphère à la fois lyrique et troublante. Le texte manuscrit noir, omniprésent, semble envahir l’espace visuel et mental, représentant un flux de pensées intimes ou contradictoires.


Cette œuvre peut être interprétée comme un commentaire sur les dualités intérieures : l’amour ressenti contre la peur persistante. L’image explore la coexistence de ces forces opposées dans un même être, exprimées à travers la chair, les mots et la texture émotionnelle de l’image. L’ensemble évoque un poème visuel sur la tension entre tendresse et douleur, incarné dans un corps qui devient surface d’écriture.


Dimension symbolique de l'oeuvre


L’image regorge d’une symbolique riche et ambivalente, orchestrée autour de la confrontation entre amour et haine, corps et texte, vulnérabilité et force.


Cette image offre plusieurs niveaux de symbolique profonds et interconnectés :


La dualité des passions humaines La juxtaposition "Love you can feel" et "Fear holds tight" illustre la proximité troublante entre amour et peur, deux émotions intenses qui peuvent coexister ou se transformer l'une en l'autre. Cette dualité suggère que les sentiments les plus forts portent en eux leur propre contradiction. Les phrases « Love you can feel » et « Fear holds tight » semblent lutter pour dominer l’image. Leur présence simultanée évoque la fine frontière entre amour passionné et la crainte destructrice, le rejet social, l’idée que ces émotions cohabitent dans nos relations profondes, ou encore la transformation de l’un en l’autre. Le rouge de l’amour (passion, désir, douleur) et le bleu de la crainte (froideur, intensité, lucidité) accentuent cette dualité chromatique.


La nudité du sujet Le modèle nu, exposé dans une position inversée et tendue, agit ici comme une surface de projection. Son corps devient un palimpseste sur lequel sont inscrites les tensions internes à la manière d’un journal intime rendu visible. Cette posture vulnérable symbolise une exposition de l’âme, un effeuillage de l’intériorité.


L'incarnation de la mémoire Les textes manuscrits qui transparaissent à travers le corps du modèle symbolisent comment les mots, les souvenirs et les émotions s'inscrivent littéralement dans notre chair. Le corps devient archive vivante des expériences passées, portant les traces indélébiles de lettres d'amour et de rupture. L’accumulation de mots manuscrits noirs, superposés au corps et au fond, rappelle un brouhaha mental ou émotionnel, une surcharge de pensées, de souvenirs, de jugements ou de blessures.


La temporalité des sentiments L'opposition entre l'écriture manuscrite ancienne et la typographie moderne représente la permanence des émotions humaines à travers les époques. Les passions d'hier résonnent encore aujourd'hui, suggérant l'universalité et l'intemporalité de l'expérience amoureuse. Elle peut évoquer la persistance des paroles qu’on s’adresse ou qu’on reçoit, la mémoire traumatique ou la complexité de l’identité intérieure.


La vulnérabilité et l'exposition La pose du modèle, bras levés et dénudée, évoque un état de vulnérabilité totale face aux sentiments. Cette nudité symbolique représente l'âme mise à nu par l'amour et la souffrance. La posture inversée peut symboliser une perte de repères ou un retournement de la logique affective. L’image questionne la rationalité des sentiments, l’absurde coexistence des contraires, et laisse entendre que la clarté est noyée dans une mer de pensées contradictoires.


La transformation par l'émotion La technique de surimpression suggère que nous sommes littéralement transformés par nos expériences émotionnelles. Les mots d'amour et de haine ne restent pas extérieurs mais modifient notre essence même. En arrière-plan, les textures aquatiques ou marines peuvent être perçues comme un symbole de purification émotionnelle, immersion dans l’inconscient, ou noyade dans des sentiments trop puissants.


L'art comme catharsis L'ensemble évoque le processus créatif comme moyen d'exorciser et de transcender la douleur, transformant la souffrance personnelle en expression artistique universelle. L’œuvre est un théâtre intérieur où se joue un drame affectif, entre passion et douleur, lucidité et confusion. Elle questionne la perméabilité du corps aux émotions, la réversibilité des sentiments, et le langage comme exutoire ou comme prison. C’est une œuvre émotive, sensorielle et introspective, qui appelle autant à la contemplation qu’à l’identification.



Cette photo est-elle choquante ?

La perception de cette photo comme choquante dépend fortement du contexte culturel, du public visé et de la sensibilité individuelle. Cependant, voici une analyse nuancée pour situer sa portée :


Pourquoi certains pourraient la trouver choquante :

Nudité explicite :

Le corps nu, bien que traité de manière artistique et non pornographique, peut heurter dans des contextes conservateurs ou dans des lieux où la nudité est encore taboue.


Posture inhabituelle :

La position inversée, tendue, presque contorsionnée du modèle peut évoquer de la souffrance ou une perte de contrôle. Cela peut provoquer un inconfort émotionnel ou physique chez certains spectateurs.


Conflit entre amour et haine :

La juxtaposition de phrases émotionnellement fortes — Love you can feel / Hate is alive — crée une tension dramatique qui peut déranger par sa franchise ou sa violence implicite.


Écriture envahissante :

Le texte manuscrit noir, dense et superposé, donne une impression de saturation mentale, pouvant être perçu comme oppressant ou anxiogène.



Pourquoi elle ne l’est pas dans un contexte artistique

Traitement esthétique maîtrisé :

Les éléments sont visiblement pensés, composés et intégrés dans une démarche artistique. Il ne s’agit pas de provocation gratuite, mais d’exploration psychologique et émotionnelle.


Symbolisme fort :

Le message va au-delà de l’image : on y lit une réflexion sur la dualité humaine, la complexité des sentiments, le poids du langage sur le corps — autant de thèmes explorés depuis longtemps dans l’histoire de l’art.


Absence d’obscénité :

La nudité ici n’est ni sexuelle ni violente. Elle est métaphorique, utilisée comme médium expressif pour traduire un état intérieur.


Non, cette image n’est pas intrinsèquement choquante, mais elle peut bousculer. Elle interroge, dérange peut-être, mais au service d’une intention artistique claire. Dans un cadre de galerie, de publication artistique ou d’exposition thématique, elle serait pleinement légitime et perçue comme une œuvre forte et engagée.



Cette photo a-t-elle une valeur artistique ?

Cette photo possède une réelle valeur artistique, et ce pour plusieurs raisons fondamentales liées à sa conception, son impact visuel, et sa portée symbolique. Voici quelques pistes de réflextion :

 

Composition visuelle maîtrisée

  • Le corps humain est placé au centre, dans une posture expressive et déstabilisante, qui capte immédiatement l’attention. Cette position inversée rompt avec la norme et invite à une relecture du corps comme surface de langage.

  • L’interaction entre le texte, l’image, et le fond crée un rythme visuel complexe. L'écriture manuscrite se superpose comme un voile ou une cartographie intérieure.

 

Richesse symbolique

  • L’œuvre met en tension deux sentiments opposés : l’amour et la haine, inscrits non seulement dans le texte mais aussi dans la gestuelle et l’ambiance.

  • Le corps devient un espace de projection émotionnelle, un palimpseste où se déposent les conflits intérieurs.

  • L’image évoque à la fois la fragilité, l’intensité affective, et la cohabitation des forces contraires qui nous habitent.

 

Intention conceptuelle

  • On ne perçoit pas ici une recherche de beauté décorative, mais plutôt une volonté de questionner, de provoquer une réflexion sur le rapport au corps, aux mots, aux émotions extrêmes.

  • Cela s’inscrit dans une démarche artistique contemporaine, proche des enjeux explorés dans la photographie performative, le body art ou l’art introspectif.

 

Inscription dans une tradition artistique

  • Cette photo s’inscrit dans une filiation avec des artistes comme Francesca Woodman, Jenny Holzer (pour l’usage du texte), ou Antoni Tàpies (dans le rapport au corps et à la matière textuelle).

  • Elle dialogue aussi avec des courants comme l’expressionnisme émotionnel, la poésie visuelle, et même certaines formes de surréalisme contemporain.

 

Cette photographie a une valeur artistique affirmée, tant par sa construction que par son puissant potentiel d’interprétation. Elle serait parfaitement à sa place dans une exposition thématique, une publication artistique, ou une démarche d’auteur.

 

 

De quels artistes "Coeur en suspend" s'inspire-t-il ?


La photo "Coeur en suspend" évoque une richesse expressive et conceptuelle qui dialogue avec plusieurs figures majeures de l’ar contemporain, notamment dans les domaines de la photographie, de la performance et de l’art textuel. Voici quelques artistes dont l'œuvre pourrait avoir inspiré une telle création :

 

Photographe emblématique de l’introspection corporelle, Woodman utilisait son propre corps dans des compositions mystérieuses, floues, souvent fragmentées, pour évoquer l’identité, la fragilité et l’inconscient.  

Résonance : la posture vulnérable, la présence charnelle mêlée à une forme de disparition psychique.

 


Célèbre pour ses "truisms" et textes projetés dans l’espace public, Holzer marie langage et impact visuel pour créer une tension émotionnelle forte.

Résonance : le contraste des mots inscrits dans l’image porteurs d’un choc affectif.

 

Elle explore les relations intimes, l’obsession, la perte, souvent en combinant texte, photographie et performance autobiographique.

Résonance : l’aspect narratif implicite, la charge émotionnelle mise en scène avec une apparente douceur.


Photographe engagé dans une esthétique brute, incarnée et souvent dérangeante. Il explore les pulsions, les états limites, les corps et la violence émotionnelle.

Résonance : l’intensité affective, la tension entre chair et écriture, entre plaisir et douleur.

 

Avec ses œuvres écrites à la main, ses autoportraits bruts et ses confidences publiques, elle transforme la douleur intime en geste artistique.

Résonance : l’aspect manuscrit, l’exposition de soi, les mots poignants comme forme d’exorcisme émotionnel.

 

Graphiste et plasticienne, elle intègre des textes forts dans des images photographiques pour dénoncer ou questionner les constructions sociales et psychologiques.

Résonance : le contraste visuel texte/image, la charge sémantique immédiate et percutante.

 

L’œuvre pourrait ainsi s’inscrire dans un croisement entre photographie corporelle introspective, poésie visuelle et art textuel engagé, à mi-chemin entre le regard intime et la déclaration universelle. Elle s’inscrit dans une tradition d’artistes qui utilisent le corps comme langage, le texte comme matière et la peur comme territoire d'exploration sensible.


 

Note curatoriale

Par Gabriel Cuny, Directeur, Galerie Éclats 521


« Coeur en suspend » interroge la manière dont les mots façonnent l’identité et marquent le corps. À travers un langage visuel chargé et une composition dérangeante, Claude Gauthier expose la chair comme terrain d’affrontement entre l’amour et la haine, et pousse le spectateur à reconsidérer les dualités qu’il porte en lui-même.


Dans cette œuvre percutante, Claude Gauthier propose une méditation visuelle sur la coexistence des contraires affectifs. Le corps devient ici support de mémoire, écran de projection intérieure, voire page d’écriture vivante, saturée d’écritures manuscrites noires qui envahissent l’image comme les pensées envahissent l’esprit. Le fond texturé, semblable à des pages noyées, renforce l’impression d’un inconscient à ciel ouvert.


Loin de chercher l’harmonie, l’œuvre assume l’inconfort, la fragmentation émotionnelle, et explore la complexité humaine dans sa dimension la plus brute. Elle évoque des filiations avec les écritures corporelles de l’art performatif, les tensions du body art, et la poésie visuelle contemporaine.

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