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Quand la photographie dialogue avec l’Antiquité

  • Claude Gauthier
  • 7 nov.
  • 2 min de lecture

Dernière mise à jour : 8 nov.

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Dans cette image du danseur Luca Giaccio captée par David Vance en 2015, le photographe puise ouvertement dans un répertoire visuel classique dont les origines précèdent de plusieurs siècles l’apparition de la photographie. Il s’inscrit dans une longue tradition où le corps masculin devient un vecteur d’harmonie, d’équilibre et de tension expressive, héritée autant de la sculpture grecque que du néoclassicisme.


Échos de la sculpture grecque antique

La posture du modèle (poids du corps porté sur une seule jambe, bras tendu vers l’avant, jambe arrière levée) renvoie directement aux canons de la statuaire hellénistique. On y retrouve la géométrie corporelle du Discophore et des athlètes de Polyclète, marqués par un sens aigu de l’équilibre et de la tension interne. D’autres rapprochements sont possibles avec les figures dynamiques d’Euphranor ou de Lysippe, dont les œuvres associaient mouvement et grâce.


Dans un registre plus tardif mais profondément inspiré de la Grèce antique, la parenté est manifeste avec le Mercure volant de Giambologna, dont la silhouette repose sur un unique point d’appui, jambe arrière soulevée, corps en torsion et élan ascendant. Cette sculpture semble être une source directe pour Vance, tant la parenté gestuelle est frappante.


Mercure volant de Giambologna, attribué à Jean Bologne (1574-1700), au Musée du Louvre
Mercure volant de Giambologna, attribué à Jean Bologne (1574-1700), au Musée du Louvre

La douceur néoclassique

Au-delà de la pose, la lumière feutrée, la peau dorée et la modélisation délicate du corps rappellent les œuvres d’Antonio Canova : Persée, Orphée ou encore Adonis. Chez Canova, l’idéal masculin se manifeste dans une harmonie presque chorégraphiée, un mélange de douceur et de perfection anatomique que Vance transpose ici dans un langage photographique contemporain.


Une autre référence particulièrement proche se trouve dans les bronzes d’Edgar Degas, notamment Grande arabesque, troisième temps. La similitude de l’équilibre sur une jambe, de la jambe arrière étirée et du bras allongé témoigne d’un même registre gestuel, à la frontière entre sculpture et danse.


First Arabesque Penché par Edgar Degas (1892 - 1920), Au Musée du Met à New York
First Arabesque Penché par Edgar Degas (1892 - 1920), Au Musée du Met à New York

La trace de la danse classique

La pose correspond également à une arabesque telle qu’on la retrouve dans la danse classique : tout le poids reposant sur une jambe, l’autre tendue en arrière, le bras opposé créant un contrepoids précis. Cette posture emblématique traverse l’histoire de la scène, de la danse académique aux expérimentations modernes. On pense notamment à Nijinsky dans L’Après-midi d’un faune, où le corps devient signe et mouvement.


Leo Rauth, Vaslav Nijinsky, Dans L’Après-midi d’un faune, 1912
Leo Rauth, Vaslav Nijinsky, Dans L’Après-midi d’un faune, 1912

Le néo-académisme de David Vance

David Vance est reconnu pour son esthétique nourrie de références à la sculpture grecque, au néoclassicisme et à la danse contemporaine. Dans plusieurs séries, il compose des « statues vivantes » en studio, sculptant la lumière comme un matériau plastique.


Cette photographie de Luca Giaccio s’inscrit pleinement dans cette démarche. Elle redonne au corps masculin une dimension intemporelle, située à la rencontre du mythe, de la danse et de l’iconographie classique,une manière pour Vance de réactualiser, par la lumière et la pose, un héritage visuel millénaire.

 
 
 

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